Avec un sens du détail qui évoque Narayan ou Rohinton Mistry, elle croque sur le vif les bruits des rues et des échoppes animées, les odeurs de tandooris et de rotis frais sortis du four, les couleurs chatoyantes des saris, la vie au quotidien des petites gens, et mêle tragédie et comédie pour dénoncer avec une subtile ironie la condition des femmes et les inégalités de la société indienne. Rina Kapoor, fille d’une riche famille d’industriels, qui par défi des conventions fait un mariage d’amour et Shilpa, qu’un mariage arrangé va mener à l’alcoolisme et à la folie, appartiennent à deux mondes séparés par des barrières sociales et culturelles infranchissables. Dans sa boutique de saris, seul point d’intersection entre la pauvreté la plus abjecte et la richesse la plus ostentatoire, le modeste et attachant Ramchand berce quelques temps l’illusion qu’il peut remettre en question ‘l’équilibre du monde’. Tout seul et péniblement, il apprend à lire et à écrire l’anglais, seul passeport pour Delhi, Chandigarh et le monde du travail. Mais la misère qui l’entoure et l’oppresse physiquement et moralement, va le mener jusqu’au point de rupture, avant qu’il ne se résigne à un retour fataliste au statu quo. Un grand roman tout simple, plein de tendresse, d’humour et d’humanité.C’est l’essence même de l’Inde que Rupa Bajwa, une jeune Indienne de 30 ans, réussit à capter dans ce remarquable premier roman qui a pour cadre sa ville natale, la petite ville d’Amritsar, dans le nord de l’Inde, où sur ordre d’Indira Ghandi, des Sikhs furent massacrés par l’armée indienne dans l’enceinte du Temple d’Or en 1984.
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